Chine

La période relative à la Chine est couverte en 5 articles :

  1. Pékin et ses alentours (dont la Grande Muraille)
  2. Xi'an, le mont Huashan puis les portes du Tibet à Xiahé
  3. De Langmusi aux Pandas de Chengdu en passant par le fabuleux parc de Jiuzhaigou
  4. Shanghai et le village d'eau de Xitang
  5. Le mont Huangshan, les rizières du dos du dragon et les paysages de Yangshuo (à venir)

Les articles sont par contre présentés par ordre antéchronologique, du plus récent au plus ancien, 1 par page.

Xi'An et Xiahé sont dans une jonque

C’est le lundi 3 novembre que nous arrivons à Xi’An, ville fortifiée de la province de Shaanxi, marquant le début (ou la fin, ça dépend dans quel sens on regarde) de la célèbre route de la soie. Cette ville et ses environs fourmillent de lieux historiques, elle est incontournable lors de tout voyage en Chine qui se respecte. Les remparts de la vieille ville forment un carré parfait, il est possible d’y grimper et d’en faire le tour en vélo (ou à pied, mais du coup c’est long). Mais n’imaginez pas pouvoir yvous y rendre sans ouvrir votre bourse au préalable, comme absolument TOUTE activité en Chine, c’est payant et pas donné (finalement on n’y est pas allé, mais ce n’est pas qu’on soit radin c’est surtout que Carole était toujours avec nous et qu’elle l’avait déjà fait cette bougresse !).

Après avoir déposé nos sacs dans un hotel vraiment sympa juste à coté de la sortie sud de la vieille ville (Shuyuan youth hostel), nous nous aventurons à la découverte du quartier musulman. Ca aussi Carole l’a déjà visité, mais bon il s’y trouve un grand nombre de petites boutiques, d’étales et autres vendeurs de rue, donc étonnament cela ne la dérange pas d’y retourner ;) Pour ma part ça me lasse assez vite et je fais donc cission pour partir de mon coté voir la Grande Pagode de l’Oie Sauvage au sud de la ville. Celle-ci, d’une impressionnante hauteur et richement ornementée, fut construite en 652 AD pour abriter des textes bouddhites sacrés (Sustras) par le moine Xuan Zang, ramenés d’Inde et qu’il passa 19 années de sa vie à traduire avec une équipe de linguistes. Le réseau de bus de Xi’an, comme dans beaucoup de ville en Chine d’ailleurs, est extrèmement développé. Il doit y avoir plusieurs centaines de lignes, et pour chacune d’elles les bus s’enchaînent à peu près toutes les 5 minutes, voire moins sur certaines lignes (nous voyons des bus s’enchaîner toutes les 30 secondes environ…). C’est juste complètement fou ! Mais bon, c’est vrai qu’ils sont beaucoup ces chinois. Bref du coup il est très facile de circuler en transport en commun, pas besoin de dépenser plus en taxi.

Le lendemain nous partons à la conquête du mont Hua Shan, l’une des cing montagne sacrée du Taoisme. La légende veut que des hermits taoistes de plus de 500 ans y vivaient, ne subsistant que d’épine de pin et d’herbes sauvages. Pour s’y rendre il suffit de prendre un bus à la gare pour 22Y, qui couvre les 130km en 2h. Si vous comptez faire l’A-R dans la journée, partez très tôt afin d’avoir le temps de faire autre chose que monter et redescendre. Pour notre part nous comptons dormir au sommet et assisiter au lever du soleil depuis le pic Est. On a tous en tête les dessins de montages chinoises que l’on voit sur les vieilles tapisseries, les vases etc… Un assemblage de pics presques verticaux, de couleur claire, et surmontés et parsemés par des groupes d’arbres verts et tarabiscotés, et s’élevant au-dessus d’une mer de brume bleutée. Et bien c’est exactement ça. Du coup l’ascension n’est pas de tout repos, les chemins ne font pas beaucoup de détours et sont donc très raides  la plupart du temps. Au mont Hua Shan il y a 2 chemins possibles (ce qui permet de varier pour la montée puis pour la descente) : coté Est, où se trouve le fameux chemin des soldats (et le téléphérique pour les riches feignants), et coté ouest. Le chemin des soldats est plus court mais bien plus abruptes et 2 sections de 50m sont pour ainsi dire verticales, marches très étroites taillées dans la roche avec une chaîne courant sur le coté pour se tenir (et ainsi ne pas mourir). Mais c’est finalement décevant puisque aujourd’hui ces grandes sections verticales sont fermées et des escaliers normaux permettent de les contourner. C’est pour descendre que nous emprunterons ce chemin qui n’est tout de même pas de tout repos puisqu’il n’est constitué QUE de marches. Et descendre des marches abruptes pendant 3h je peux vous assurer que ça vous flingue les genoux et les mollets bien comme il faut.

Pour l’ascension nous prenons donc le chemin de l’ouest partant du village Hua Shan. Au départ de ce dernier nous faisons la rencontre de 3 suédois avec qui nous marcherons jusqu’au lendemain (désolé j’ai complètement oublié les noms… hmmm… pas très grave, ils ne liront vraisemblablement pas ces lignes vu les 2 mois que j’ai mises à les écrire). Le chemin de l’ouest est moins abrutpes, en tout cas au début puisqu’il commence par 4km de chemin de pierres pavées serpentant sur les contre-forts du mont, mais la dernière partie passe tout de même par plusieurs escaliers taillés dans la roche quasiment verticaux. C’est fatiguant mais on relativise lorsqu’on voit les vieux chinois portant des centaines de kilos de provision en tout genre sur leurs épaules, pas après pas, vers les restaurants et hotels aux sommets des 5 pics. Cela doit coûter bien moins cher à ces derniers de faire monter leurs provision à dos d’homme plutôt que par le téléphérique… En gérant bien son stock (parce que bon du coup faut pas avoir un besoin urgent de margarine ou de café), pourquoi s’embêter à payer plus c’est sûr.

Le mont Hua Shan est en effet constitué de 5 pics : Nord, Sud, Est, Ouest et Centre. L’ascension se fait sur le pic nord, depuis lequel il est ensuite possible de passer de pic en pic (sans avoir à redescendre dans la vallée, Dieu merci). Nous arrivons sur le pic nord après 3h de marche, en milieu d’après-midi. La vue est epoustouflante, d’une part sur les nombreux monts aux alentours qui percent la brume tout autour de Hua Shan et d’autre part sur les 4 autres pics, fanstastiques et majestueux avec leurs arêtes abruptes, leurs rochers imposants, les buissons survivant dans les failles de leurs paroies et les forêts aux arbres tordus s’étalant sur leurs sommets. C’est d’ailleurs une gigantesque arrête abrupte qu’il faut emprunter pour rejoindre les autres pics. C’est impressionnant mais sans doute pas autant qu’il y a quelques dizaines d’années. Aujourd’hui des marches y sont taillées alors qu’avant les visiteurs devaient la passer à quatre pattes… Ca laisse rêveur. Depuis le pic central nous nous dirigeons avec Carole et nos amis suédois vers le pic Est où nous comptons passer la nuit, afin d’être en position pour le lever du soleil. Ici le chemin passe soit par des escaliers, soit par une section verticale (et même avec un léger surplomb) taillée dans la roche, type chemin du soldat, sur une quinzaine de mètres. Evidemment nous l’empruntons et finalement c’est heureux de ne pas avoir à monter ce genre de passage sur plus de 50m ;) Partout sur les barrières en chaîne des milliers et milliers de cadenas à prière avec de petits foulards rouges sont attachés et fermés par les locaux et les touristes espérant ainsi voir leurs vœux se réaliser. Les prix des hotels sur les différents pics sont assez exhorbitants, 200Y pour la plupart, mais nous finissons par en trouver un bien pourri qui nous offre gracieusement un lit dans un dortoir de 16 non chauffé pour seulement 100Y :p 

La nuit finit par tomber et la température ne tarde pas à la suivre. Nous faisons donc un rapide festin de nos soupes de nouilles apportées en haut à la sueur de nos fronts et allons nous coucher relativement tôt (pas grand chose d’autre à faire dans la nuit froide et en plus il va falloir se lever tôt pour le lever de soleil). Le dortoir ne tarde pas à être envahi de touristes chinois reprenant ainsi la majorité sur l’Europe que nous représentions vaillamment à 6. Le matin, pas de surprise, la température est toujours glaciale. Ce n’est donc pas très amusant d’attendre que ce fichu soleil daigne se montrer, mais au final le spectacle en vaut la chandelle et c’est sous les applaudissements des nombreux touristes se trouvant sur les bords du pic est que celui-ci apparaît enfin. Nous finissons ensuite notre tour des pics du Hua Shan : sud, ouest puis de nouveau le pic nord pour entamer la descente par le chemin du soldat. Au pied de ce coté de la montagne il faut aussi prendre une navette pour rejoindre le parking où arrivent et partent les bus pour Xi’An, mais cette fois, allez savoir pourquoi, elle est payante et aussi chère que le bus pour Xi’An. Vu le prix d’entrée pour le mont, ça fait un tout petit peu chier finalement mais bon ce n’est pas la première fois ni la dernière que le nombre de choses payantes en Chine nous laissera pantois.

 Après être revenu sur Xi’An et avoir pris une bonne nuit de sommeil (au chaud), nous décidons d’aller visiter le tombeau de l’Empereur Jingdi. Pour cela nous suivons les indications (jamais erronnées comme nous le savons bien) du Lonely Planet. Ils nous disent de prendre le bus 4 depuis le mur nord de la vieille ville jusqu’à une proche banlieue, puis de prendre un autre bus 4… Déjà c’est suspect, soit dans la tête de l’auteur il n’y a que des bus 4 à Xi’An, soit il y a une faute de frappe, soit le réseau de bus de Xi’An n’est pas très pratique à suivre. Etonnament donc le bus 4 ne viendra jamais mais après renseignement pris auprès d’un passant, nous trouvons le bon bus. A l’embranchement pour le second bus nous demandons donc de nouveau à une passante. Celle-ci, parlant un anglais impeccable, nous propose de l’accompagner chez son frère travaillant à proximité pour qu’elle regarde sur internet. Une fois dans la boutique de son frère cela devient du grand n’importe quoi. Ils nous offrent du thé, des cigarettes, puis son frère nous dit qu’il n’y a pas de bus pour se rendre au tombeau. Il propose de nous prêter sa voiture pour y aller…  WTF ? Je lui dis que je ne suis pas sûr d’avoir le droit de conduire sa voiture mais que s’il m’indique le chemin, pourquoi pas. On nage tout de même en plein délire. Mais il change d’avis et nous propose finalement de nous emmener et de venir ensuite nous chercher… Heuuu OK mec, mais bon nous si tu nous indique juste quel bus prendre ça nous va tu sais. La fille, Ruby, nous propose alors de venir avec nous et de nous servir de guide si on lui paye son billet d’entrée. Nous acceptons donc et partons avec elle, son frère et une amie à eux pour le tombeau. Son frère repart, nous payons le billet de Ruby, son amie paye le sien (on est un peu dég car à quelques jours près on passait en basse-saison et le prix chutait de moitié) et nous nous dirigeons vers l’entrée. Toutefois juste avant d’entrer nous apercevons un bus 4 arriver sur le parking… Il existe donc bel et bien ! Tant pis, la situation est plus amusante ainsi, avec cette famille bizarrement gentille.

L’intérêt principal du tombeau de Jingdi réside dans les 21 fosses étroites, excavées, où se trouvent plus de 50 000 petites figurines en terre-cuite représantant toutes sortes d’éléments à la fois de la vie militaire, mais surtout de la vie quotidienne : des centaines d’animaux de ferme, des chariots, des gens de la cour, des ustensils de cuisisne etc… L’empereur entendait ainsi continuer sa vie dans l’au-delà sans changement, comme si de rien n’était. Les fosses (à priori la majorité n’est pas encore excavée) sont positionnées telles les rayons d’un soleil autour d’une colline, le tout était entouré par un mur d’enceinte dont une toute petite partie subsiste, restaurée mais en mauvais état. Les fosses sont aujourd’hui situé très profondemment dans la terre, le musée donnant accès à 21 d’entre elles est donc sous-terrain, c’est assez marrant et plutôt bien amménagé. Nous nous baladons ensuite dans les forêts avoisinantes. Celles-ci nous semblent banales mais Ruby nous dit que ces arbres aux feuilles jaunies par l’automne sont particuliers (pour une raison qui nous échappe finalement). Mais elle doit dire vrai car tout plein de chinois s’y promènent et posent de longues minutes pour des photos dans des positions absolument grotesques. Mais bon, on le savait les chinois raffolent des photos et Ruby ne fait pas exeption. Dès notre entrée dans la forêt elle et sa pote nous demandent de les prendre en photo. Elles se mettent alors à enlacer les troncs, à se courber, à se balacer tout en faisant des têtes bizarres sur des dizaines de photos. J’ai beaucoup de mal à ne pas éclater de rire…

Le retour vers Xi’An est encore plus surréaliste que l’aller. Ruby nous dit que finalement son frère ne pourra pas venir nous chercher, mais que comme il y a effectivement un bus ce n’est pas gênant… Ba voyons. Le problème c’est qu’il n’y a qu’un bus par heure et que ça doit être le seul de toute la Chine qui n’accepte pas plus de passagers qu’il n’y a de sièges… Et vu le monde devant il est clair que nous n’aurons pas les 2 suivants.  On commence légèrement à désespérer lorsque Ruby repère un petit groupe partant à pied dans une autre direction. Il s’avère qu’un chinois connaît un chemin menant à un village à 10 minutes de là d’où nous pouvons prendre un autre bus. Nous les suivons donc à travers la rase campagne et même si cela nous prend bien plus de 10 minutes nous passons un moment juste complètement improbable. Le Chinois que nous suivons est complètement rond ! Il chante, crie des monologues, tente de nous parler sans se soucier que nous ne comprenons pas un traitre mot de ce qu’il peut bien racconter, pose avec nous et les autres chinois nous accompagnant sur des dizaines de photos et vidéos. Ruby nous apprend que c’est un ancien avocat qui n’exerce plus (vu son état en milieu d’après-midi c’est sans doute mieux ainsi). Le chemin s’éternise un peu et je commence à douter que notre guide sache où il se trouve (ou même qui il est) lorsque finalement une bonne âme s’arrête avec son van et nous emmène jusqu’à l’arrêt de bus un peu plus loin. L’odeur de liqueur émanant de notre ami est insoutenable mais c’est toujours aussi drôle. Dans le bus ensuite, c’est un festival ! En plus de l’attraction principale imbibée qui continue ses extravagances, nous en constituons une aussi étant donné que les personnes dans le bus n’ont jamais dû voir le moindre touriste sur cette ligne. Presque tout le monde participe, les photos pleuvent dans tous les sens, les tentatives de communication également. Extraordinaire ! Enfin le bus arrive près d’une station de métro pouvant nous ramener dans le centre de Xi’An, il est temps, la mort dans l’âme de dire au-revoir à tout nos amis, dont Ruby et de rentrer à notre hotel. Le soir nous prenons un dernier verre avec Carole dans le bar très animé de l’hotel pour fêter son départ. Carole, au grand désespoir d’Anaïs, retourne à Pékin pour prendre son avion vers Paris le lendemain matin.

Après ce déchirant départ le vendredi 7 novembre (tous les nantais sont enfin rentrés !:p), Anaïs et moi mettons le cap vers le site de l’Armée des guerriers en terre-cuite, Terracotta. Cet incroyable endroit héberge l’un des plus impressionnant aperçu de la Chine antique. Environ 6000 guerriers en terre-cuite, grandeur nature s’il vous plait et tous différents les uns des autres, ont monté la garde sous terre sur l’âme de leur empereur, Qin Shi Huang, unificateur de la Chine, pendant plus de 2 millénaires !! Apparemment celui-ci entendait ainsi continuer son règne dans l’au-delà. Règne qui fut, en tout cas dans le monde des vivants, remplis d’accomplissements importants : création d’un gouvernement centralisé qui servira de modèle pour toutes les dynasties à venir, standardisation des mesures, de l’écriture, et de la monnaie, construction de presque 7000km de route et conquête de 7 royaumes principaux, le tout avant d’avoir 40 ans. Bon apparemment c’était aussi un peu un tyran fanatique qui aurait fait enterré vivant 460 érudits qui auraient osé le critiquer. Oui il était assez sensible à la critique, voilà c’est tout. Pas de quoi en faire une histoire, il suffit de le savoir et puis on garde son avis pour soit. Même si c’est vrai que l’idée de construire 6000 bonhommes en terre-cuite n’a pas dû faire l’unanimité tout de suite, ce n’était pas la pire non plus. Il aurait pu décider de construire un mur de 7000km dans la montagne comme ses successeurs. Alors hein ?! Et puis le gars il a bossé quand même, peut être qu’il la mérite son armée. Bande d’ingrats ! J’en finis avec l’Histoire pour vous dire que le site a été découvert en 1974 par des paysans qui creusaient un puit. Pas d’eau du coup, mais bonne journée quand même.

L’entrée du site est franchement honteux pour la Chine : 150 yuan, soit presque 20 euros. Mais une guide nous proposant ses services nous donne une idée. Elle nous dit qu’elle coute 180yuan mais qu’en montrant nos permis de conduire français aux guichets elle peut les faire passer pour des cartes étudiants et nous avoir ainsi moitié-prix. On ne prendra pas la guide, mais son idée oui héhéhéééééééé ! Et ça marche comme sur des roulettes, entrée à 75 yuan SVP !

Le site comprend 3 fosses et un petit musée. Il vaut mieux commencer par la n°3, puis la n°2 et finir par la plus grande, la n°1, sinon vous risquez d’être déçus par les n°2 et 3, bien moins impressionnantes. La n°3 est la plus petite, elle ne comprend que 72 guerriers et chevaux. Il est pensé qu’il s’agit des quartiers généraux avec les principaux chefs d’armée. Elle est petite certe, mais du coup on voit les statues de près. Le détail des visages et des habits est véritablement bluffant. La n° 2 est immense (censée contenir 1300 statues) mais la très grande majorité de la fosse n’est pas excavée. Il est cependant intéressant de voir le bois fossilisé des poutres soutenant le plafond effondré en lignes régulières sur le contenu des salles, encore remplies de terre aujourd’hui. On observe aussi le travail d’excavation, beaucoup de statues sont brisées en de nombreux morceaux à moitié ensevelis ici et là. L’assemblage doit prendre un temps fou. Ceci nous est confirmé dans l’impressionnant fosse n°1. Absolument gigantesque, contenant plus de 6000 guerriers, dont une bonne moitiée excavée, elle abrite aussi le lieux de travail des archéologues. De nombreux puzzles 3D de statues y sont en cours. Sur la moitié excavée et restaurée de la fosse, les centaines et centaines de statues sont alignées dans un ordre impressionnant et sur des longueurs interminables. D’en haut on a vraiment l’impression d’être à la place d’un empereur de la Chine antique face à son armée prête à partir au combat. C’est saisissant et tout comme pour la Muraille de Chine (dans un degrè moindre, certes), la quantité de travail que tout cela représente est simplement exténuante.

Après une rapide visite du musée, où sont notamment exposés deux magnifiques carrosses (et chevaux) en or qui se trouvaient également dans les fosses, nous retournons à Xi’An et embarquons dans un train de nuit ves l’est, Langhzou dans la province de Gansu. A notre arrivée au petit matin nous prenons immédiatement un bus pour la petite ville tibétaine de Xiahé, située en bordure du Qinghai voisin, dernière région historiquement chinoise avant le Tibet (Houlalala engagement politique de Spin The World pour un Tibet libre !!). C’est à Xiahé, jolie petite ville au milieu d’une vallée montagneuse, que se trouve l’un des 6 principaux monastère tibétains, le monastère de Labrabg. Il s’agit de la ville tibétaine principale en dehors du-dit Tibet. Du coup si comme nous vous ne pouvez pas aller au Tibet (c’est faisable mais il faut partir en groupe organisé et guidé pour un budget minimum de 120$ par jour, dépense malheureusement non envisageable pour nous), c’est un excellent compromis.

Nous en sommes repartis 3 jours plus tard, le mardi 11 novembre et y avons passé un moment incroyable avec les locaux. Mais commençons par le commencement : le déjeuner du samedi 8 pour lequel nous nous précipitons vers un restaurant tibétain avec une belle vue sur le monastère pour gouter les spécialités locales : momos et thé au beurre de yak. Les momos sont des sortes de raviolis chinois, fris ou à la vapeur, généralement à base de viande de yak (mais pas seulement, loin de là), et le thé au beurre de yak, et bien c’est exactement ça, comme dans 7 ans au Tibet. C’est bon mais ça sent assez fort, c’est indéniable.

Le monsatère est en fait une véritable ville. La plus grande partie est occupée par les habitations des moines (4000 durant son heure de gloire, 1200 aujourd’hui), le reste étant constitués de temples, salles de prière, chörtens, chapelles dans différents bâtiments au style tibétain bien reconnaissable. Le tout est relié par un réseau labyrinthique de petites rues de terre dans lequel on peut se balader librement et croiser ainsi les moines vaquant à leurs occupations, dont les enfants-moines à la vocation précoce jouant comme tout autre gosse de leur âge. En nous baladant nous faisons la rencontre de Dorjee, un jeune tibétain faisant ses études à Lhassa et originaire de Xiahé. En visite dans sa famille avec 4 amis de Lhassa, il nous propose dans un anglais correct de nous servir de guide à travers le monsatère et ses environs. Nous visitons avec eux le Gongtang Chörten, haut de 31 mètres et contenant des décorations intérieures absolument magnifiques, il offre depuis son toit une vue spectaculaire sur le monastère. De là haut nous prenons évidemment plusieurs photos avec nos nouveaux amis et ceux-ci prennent également le temps d’une rapide prière devant une représentation bouddhiste. Nous visitons ensuite un des temples principaux, le temple Manjushri je crois, abritant comme la plupart d’entre eux une grande statue de Bouddha, une multitude d’autres représentations bouddhistes, et plusieurs receptacles à beurre de yak que les pélerins placent ici en guise d’offrande. L’odeur à l’intérieur, du fait des nombreuses bougies et de tout ce beurre de yak, est unique en son genre.

Nous parcourons ensuite une partie du Kora, chemin de prière faisant dans sa petite longueur  tout le tour du monastère sur 3km (la version longue passe dans les montagnes surplombant le monastère (cf. plus loin)). Il est parcourut par les nombreux pélerins dans le sens des aiguilles d’une montre soit debout en marchant normalement, soit, pour les meilleurs des meilleurs (légèrement fanatiques), en se mettant à genoux, puis s’allongeant de tout son long dans la poussière, se relevant, faisant 2 pas, et recommençant. Le tour doit leur prendre un temps tellement long que ç’en est innimaginable. Nous les observions pendant le dejeuner, en 30 minutes 2 d’entre eux avaient du parcourir à peu près 100mètres je pense… Tout le long du trajet se trouvent les roues à prière (1174 en tout) qu’il faut faire tourner en passant (mais ça va ceux qui marchent en s’allongeant tous les 2 pas n’ont pas à les faire tourner, les règles sont plutôt bien faites). Nous finissons la marche en passant à gauche d’un chörten (toujours passer à gauche), et observons certains pélerins qui en font le tour encore et encore inlassablement. De règle générale le pèlerin tibétain aime bien faire le tour des choses (littéralement j’entends (remarque peut être aussi au sens figuré, qui sait)), nous les verrons aussi faire des tours des différents temples du monastère.

Ayant passé une nuit catastrophique assis dans le train depuis Xi’An, nous donnons rendez-vous à Dorjee le soir et rentrons à notre hotel pour siester. Vers 20h il nous emmène dans le petit atelier de son frère, situé dans une rue de terre parallèle au monastère. Son frère est un peintre de Tanka. Les Tankas sont des peintures bouddhistes très appréciées à travers le Tibet et le Népal. On en trouve bien entendu dans tout monastère tibétain, et chez les croyants. On y représente Bouddha dans différentes positions, décors et situations, des démons protecteurs de Bouddha et autres personnages de l’histoire et de la mythologie boudhiste (nous apprendrons que la plupart des prénoms tibétains en sont issus, l’un des démons se nomme d’ailleurs Dorjee). Le rez-de-chaussée de l’atelier, dans lequel nous restons car c’est là que se trouve le poël, est petit et investi par les très nombreuses toiles en cours mais nous y tenons tous, Dorjee, son frère, 4 ou 5 apprentis, 2 petites amies, Anaïs et moi, assis sur de petits tabourets ou par terre. Les tibétains sont par tradition très généreux avec leurs invités, durant toute la soirée (et les 3 jours qui suivront d’ailleurs) ils fourniront bières, cigarettes et nourriture en refusant systèmatiquement que nous participions aux frais. Cela nous gênait mais il devint rapidement clair qu’ils seraient tout aussi gêné (voire plus) qu’un invité paye quoique ce soit. Bien que seul Dorjee parle anglais la soirée est extrêmenent conviviale et nous rigolons bien. Ils nous demandent à un moment donné de leur attribuer des prénoms français à chacun. Nous aurons donc Damien pour Dorjee, Jean-Michel pour son frère, Alain, Guillaume, Alexandre pour les apprentis et Sabrina pour l’une des copines. Nous en avions donné un autre à l’un des apprentis (David) mais apparemment cela voulait dire ‘Stupide’ en tibétain donc après s’être bien fait charrier par ses potes il nous en a demandé un autre. La soirée finit tard et en hôtes remarquables ils nous raccompagnent tous à notre hotel. Nous faisons un boucan incroyable dans la rue et comme l’entrée de notre hotel est fermée sans que nous ayons eu d’indication sur la manière de procéder dans un tel cas de figure nous faisons tous le tour et allons tambouriner sur le portail du parking arrière. Cela fonctionne, le gardien (et sans doute tous les habitants des environs) finit par se réveiller. Avant de nous séparer Dorjee nous fait promettre de quitter l’hotel dès le lendemain pour venir habiter chez ses parents. Top !

Le lendemain, après avoir fait une balade tranquille dans le monastère nous retrouvons la bande à Dorjee et mettons le cap en taxi vers les grandes plaines de Sangké entourées de monts enneigées à 14km à l’extérieur de la ville. C’est là que les tibétains font paître leur troupeaux de yaks, mais c’est surtout le cas en été lorsque l’herbe est haute et verdoyante. Du coup il n’y a pas grand chose à voir hormis le paysage. Dorjee et son frère vont alors acheter des bières et quelques snacks dans un petit village voisin et nous nous enfonçons dans la plaine en suivant un petit cours d’eau pour déguster tout cela tranquillement assis dans l’herbe, tels des lycéens au Parc de Sceaux après les cours. Nous passons encore un excellent moment même si Anaïs et moi laissons les snacks de coté : il s’agit de couenne de porc crue assaisonnée… C’est juste horrible, rien que de les voir croquer là dedans à pleine bouche me soulève le cœur. Nous retournons ensuite chez Jean-Michel (après avoir marché un bon moment sur le bord de la route car il n’y a pas de taxi dans le coin, un lointain cousin de la famille passe en van et se propose de tous nous ramener, dieu merci je ne me voyait pas faire les 14km à pied) pour prendre un apéritif bien mérité. Après avoir dîné de momos au restaurant, nous allons tous ensemble faire un karaoké dans un endroit spécialisé dans le genre de celui que nous avions vu à Pékin mais bien moins grand of course et moins sophistiqué.  A ce moment là nous comprenons que la seule source financière qui paye tout et à tout le monde depuis le début est le frère de Dorjee. Les parents de Dorjee n’ont plus de travail, Dorjee est étudiant, et les apprentis sont nourris et logés chez leur professeur. C’est Jean-Michel qui fait vivre toute sa famille, qui comprend également sa femme et leur nouveau-né ! Il nous dit donc qu’il attend de l’argent du monastère où il a vendu des toiles et après s’être excusé au moins 20 fois (sans exagérer) nous demande si on peut payer les bières au karaoké ce soir. Bien-sûr nous refusons et outrés, partons en claquant la porte ;) Nous prenons donc une caisse de 24 bières et le grand n’importe quoi du karaoké avec une bande de jeunes tibétains commence ! On s’aperçoit bien vite être entouré d’une troupe de chanteurs semi-pros et qu’on va avoir beaucoup de mal avec nos voix de casseroles (enfin surtout Anaïs vous le savez bien) à représenter la France. Après, même si elles sont jolies, les chansons tibétaines se ressemblent toutes plus ou moins, toujours dans un style mielleux, amour et eau fraîche, crooner lover. Mais que mes fans se rassurent, j’ai tout de même chanté ‘Comme elle vient’ acapela, enchaîné  par une superbe version du ‘Maréchal’ par Anaïs. Grand grand moment de musique française. Quand enfin on pensait la soirée prendre fin (depuis 2 jours j’avais l’impression de boire de la bière non stop et je n’en pouvais plus), 2 chinois de quarante ans environ qui étaient dans une salle voisine proposent de se joindre à nous et payent une nouvelle caisse de 24 bières…. HAAAAAAAAA ! (On pourra se demander qu’est ce qui peut bien pousser 2 gars de 40 ans à venir passer une soirée dans un karaoké en mode salle privée… perso si je suis tout seul avec un pote, ce n’est pas la première idée que j’aurais, mais bon, chacun son truc). Nous continuons donc et ça devient un peu bizarre, le frère de Dorjee enchaîne les chansons et commence à danser très serré avec l’un des 2 gars. Ca reste un bon moment mais vers 2h du matin je n’y tiens plus et propose à Dorjee d’y aller. Nous partons donc à pied chez ses parents qui habitent un petit village dans les hauteurs au-dessus de Xiahé. Nous mettons bien 30 minutes à y parvenir et chose très surprenante (sympa mais surprenant), le frère et ses apprentis nous accompagnent alors qu’ils retournent ensuite dormir à l’atelier (sans doute à 1h de marche de l’autre côté de la ville) !!

Le lendemain matin nous faisons la connaissance de toute la famille et découvrons la maison, entre-aperçue dans le noir la veille. Il y a donc les 2 parents, la femme de Jean-Michel et leur bébé. La maison est formée d’une sorte de grand atrium central couvert, entouré par les différentes pièces sur les 4 côtés : chambres, cuisine et débarras. Il n’y a pas de salle d’eau : les toilettes (enfin le trou dans une cabane en bois) sont à l’extérieur et ils se nettoient à partir d’eau dans un bac chauffée sur le poël. La cuisine et les chambres contiennent chacune un poël à bois pour le chauffage. Pas d’eau courante, mais tout de même l’électricité. C’est donc très rudimentaire mais charmant.

Les parents nous montrent aussi une grande hospitalité et nous servent un petit déjeuner à base de thé vert, de pain et de beurre de yak. Enfin c’est plutôt la belle-fille qui nous sert. Au fur et à mesure que nous les observons et échangeons il nous apparaît qu’elle n’a pas une position très agréable. Elle a quitté sa ville natale, sa famille et ses amis pour venir s’installer dans sa belle-famille et son mari ne rentre qu’une fois par semaine (et encore). Elle est quasiment constamment en train de faire telle ou telle corvée, parfois aidée par la mère. Lorsque le père est là elle doit anticiper ses désirs, remplir sa tasse de thé dès que celle-ci commence à se vider, lui servir à manger etc etc. C’est limite si elle ne reste pas debout à côté de lui en attendant qu’il lui demande ou montre un signe d’un quelconque besoin. Et la pauvre n’a que 20 ans. Je remarque aussi qu’elle ne prend que rarement part à la conversation et lorsqu’elle le fait les autres n’accordent leurs attention à ce qu’elle dit qu’une fois sur deux. Nous sommes un peu triste pour elle, mais si c’est peut-être traditionnel, et regrettons de ne pas pouvoir lui parler nous-même à cause de la langue. Autre fait marquant : le bébé ne porte pas de couche mais un pantalon ouvert devant et derrière afin qu’il puisse faire ses besoins sans rien salir. Cette astuce me laisse dubbitatif puisque s’il lui prend l’envie d’uriner alors que quelqu’un le tient dans ses bras, c’est le pull et/ou le pantalon de ce dernier qu’il faudra nettoyer (ce qui arrivera au moins une fois le temps de notre séjour chez eux).

Nous partons ensuite avec Dorjee parcourir le grand chemin de prière qui passent dans les montagnes surplombant le monastère. En passant dans un village nous croisons un grand groupe de personnes travaillant à la construction d’une maison. Une vingtaine de femme sont assignées au transport de la terre sur le toit (pour l’isolation) à l’aide de panier d’osier qu’elles portent dans le dos autour des épaules. Nous nous arrêtons et leur proposons de les aider un peu à leur tâche. Cela les fait rire et elles acceptent avec plaisir. Tous s’arrêtent alors quelques instants pour nos observer et nous prendre en photo. Au bout de 2 aller-retours on commence à les plaindre, elles qui doivent faire ça toute la journée, mais l’ambiance de travail a l’air est très joviale et légère, tout le monde est souriant. Le chef du chantier nous accueille ensuite chez lui et nous offre un bol d’eau bouillante dans lequel il jette un gros morceau de beurre, du pain à tremper dans le bol (ça va plus vite que de tartiner le beurre, c’est pas mal) et du lard. Nous continuons ensuite notre marche dans la montagne et parvenons à un magnifique point de vue au-dessus de la ville et du monastère. L’envergure de ce dernier nous apparaît alors pleinement, c’est impressionnant.

En début d’après-midi nous participons à une visite guidée du monastère qui nous permet, accompagné d’un moine, d’entrer dans des temples jusque là inaccessibles. Certains contiennent des statues immenses de Bouddha, plaquées or, qu’il a été nécessaire de placer là avant la fin de la construction des murs. Nous visitons également la grande salle de prière capable d’accueillir les 1200 moines pour la prière du matin. Plusieurs emplacements sont plus ou moins surélevés pour les moines de haute hiérarchie, les Lamas (maîtres spirituels), dont le plus élevé réservé exclusivement au Dalaï Lama ou au 2ème chef spirituel, le Panchen Lama, considéré comme une émanation du Bouddha de lumière infinie (« Amitabha »). Le Dalaï Lama est venu dans ce monastère de Labrang pour la dernière fois en 1956 avant son exil en Inde en 1959 pour protéger sa liberté voire sa vie à la suite d’une révolte tibétaine à Lhassa. Le pouvoir du Dalaï Lama avait été plus ou moins maintenu après l’annexion du Tibet à la Chine de Mao Zedong en 1949, mais il disparaîtra de fait après l’exil. Lorsque nous la visitons la salle de prière est vide, il vaut donc mieux faire la visite guidée le matin. Il est alors permis d’entrer pendant la grande prière et de la parcourir avec les pélerins qui, fidèles à leurs habitudes, en font le tour encore et encore.

Nous allons ensuite prendre un thé au lait dans une ravissante maison de thé puis retournons à l’atelier du frère de Dorjee. Un des apprentis nous fait à manger avant que nous rentions chez les parents avec les 2 frères pour passer la soirée en famille. Avant d’arriver Dorjee nous demande de ne pas mentionner devant ses parents que lui et son frère fument des cigarettes et boivent de la bière. Encore une différence culturelle assez marrante. Mais du coup je me dis qu’au moins on ne boira pas de bière ce soir là et c’est très bien. Malheureusement je me fourvoyais… Le père veut trinquer avec moi, Dorjee part donc acheter des bières et le bougre revient avec 6 bouteilles de 660ml !! Fuck…. Ce qui est drôle c’est qu’il n’y a que le père et moi qui buvions. Les fils ne sont pas conviés, et les femmes (dont Anaïs) encore moins. Le père se moque de moi parce qu’il boit plus vite sa 3ème bouteille ; ne pouvant pas lui expliquer tout ce que ses fils nous ont fait boire pendant 2 jours je me contente de sourire :p

Ils nous proposent ensuite d’essayer des vêtements tibétains traditionnels, ce qui donne une petite séance d’essayage bien fun. L’habit masculin a une des manches qui est très longue (elle dépasse la main de bien 50cm) mais je n’ai pas bien compris pourquoi. Il faut donc la retrousser pour retrouver l’usage de sa main. Ultra pratiqe ;) Enfin toujours est-il que ces habits sont particulièrement ravissants.

En fin de soirée Dorjee puis ses parents nous demandent de rester une journée de plus. Dorjee l’avait déjà fait la veille et nous avions accepté mais cette fois-ci il est vraiment temps que nous poursuivions notre chemin. C’est donc avec regret et politesse que nous refusons et après une courte nuit de sommeil nous allons prendre le bus pour Langmusi, plus au sud. De nouveau Dorjee et son frère nous accompagne à la station, où nous avons la surprise de retrouver certains des apprentis. Tous ont l’air très émus de notre départ, l’un d’eux nous offre des écharpes de prière, ça fait vraiment chaud au cœur !

Ces 3 jours de vie avec les tibétains resteront certainement dans nos souvenirs comme l’une des plus belles expériences de notre voyage.

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